NOUVELLES: ALLOCUTIONS — DG ROBERTO AZEVÊDO


POUR EN SAVOIR PLUS:
> Allocutions: Roberto Azevêdo

  

Bonjour à tous.

J'aimerais vous parler de la situation actuelle concernant l'ORD: les défis auxquels nous sommes confrontés, ce que nous faisons pour les surmonter — et ce que nous serons peut-être appelés à faire de plus.

Il ne fait aucun doute que le système de règlement des différends de l'OMC a été un succès. Les chiffres parlent d'eux-mêmes.

  • En un peu moins de 20 ans d'existence du système, 482 demandes de consultations ont été reçues.
  • En 47 ans, le GATT avait traité 300 différends.
  • Et en 68 ans, la Cour internationale de justice a été saisie de 162 affaires.

Nous avons donc connu un niveau d'activité remarquable.

Pour ce qui est de l'importance économique du système, les chercheurs ont calculé que, pendant les 16 premières années d'existence de l'ORD, les différends traités ont porté sur des flux commerciaux d'une valeur d'au moins 1 000 milliards de dollars EU.

En outre, les Membres tiennent manifestement le système en haute estime. Les deux tiers d'entre eux ont y participé d'une manière ou d'une autre.

Il a été dit que le nombre toujours croissant d'ACR pourrait poser problème, mais cela n'a pas été le cas.

La plupart des mécanismes de règlement des différends prévus dans les ACR sont rarement utilisés — de fait, certains ne l'ont jamais été. Pourtant, un différend sur cinq traités à l'OMC concerne des Membres qui sont aussi parties à des ACR.

Le système fait donc l'objet d'une très forte demande.

De fait, comme vous le savez, nous avons un volume de travail sans précédent en matière de règlement des différends.

C'est une bonne nouvelle, mais cela s'accompagne de défis bien réels.

 

SITUATION ACTUELLE

Examinons donc la situation actuelle concernant l'ORD.

Je n'y consacrerai pas trop de temps aujourd'hui car j'aimerais m'attarder davantage sur le remède que sur le diagnostic.

Le nombre total de procédures en cours dont s'occupent la Division des affaires juridiques, la Division des règles et le secrétariat de l'Organe d'appel a approximativement doublé depuis 2012.

Aujourd'hui, on compte 19 groupes spéciaux en activité nécessitant une assistance à plein temps, 3 appels en cours et 4 groupes spéciaux en cours de composition.

Selon nos estimations, il ne s'agit pas juste d'une hausse temporaire et je ne pense pas que le volume des différends à régler diminuera prochainement. De fait, l'évolution pour 2014 est plus rapide qu'en 2013 pour ce qui est du nombre de groupes spéciaux établis à ce stade de l'année.

S'agissant des appels, comme vous le savez bien, la proportion d'affaires examinées a toujours été très élevée — bien plus élevée que ce qui était prévu lorsque les négociateurs ont créé un organe composé de sept membres à temps partiel. Le taux d'appel moyen est d'environ deux tiers.

Cela signifie que nous devons nous préparer à ce que 10 à 12 appels soient formés par an pour les 24 prochains mois, y compris de possibles appels dans les 2 affaires complexes concernant les aéronefs.

Si nous fermions les portes aujourd'hui, les groupes spéciaux et l'Organe d'appel ainsi que le personnel de leur secrétariat auraient assez de travail pour les occuper pendant les deux prochaines années. Mais bien sûr, les portes ne seront pas fermées et de nouvelles demandes continueront d'arriver.

Mais il n'y a pas que le nombre de différends et d'appels qui mette le système de règlement des différends à dure contribution.

Les différends sont généralement bien plus complexes qu'ils ne l'étaient durant la première décennie.

Il est maintenant courant de voir des différends faisant intervenir plusieurs parties qui formulent des allégations diverses accompagnées de communications plus volumineuses; une participation plus importante des tierces parties, une demande de traduction accrue et une plus grande complexité des procédures.

Je vais maintenant présenter quelques diapositives illustrant cette tendance à une complexité croissante des différends:

  • Le premier graphique montre le nombre total de différends en cours par année depuis la création du système en 1995; il prend en considération toutes les étapes des procédures.

  • Les deux graphiques suivants montrent le nombre de pages du réexamen intérimaire et des constatations contenus dans les rapports des groupes spéciaux par période de quatre ans de 1995 à 2014.

  • Le premier comprend les deux rapports sur les aéronefs civils gros porteurs.
  • Le deuxième les exclut car ils sont atypiques en termes de longueur. Néanmoins, vous pouvez voir que la tendance est inchangée. Pour la période de 4 ans la plus récente, la moyenne est de près de 200 pages — soit presque quatre fois plus que pour la première période de 4 ans, lorsque la moyenne était de 50 pages.
  • Le dernier graphique montre que le nombre moyen de pièces était d'environ 94 pour les 5 premières années du système et d'un peu plus de 300 pour les 5 dernières années.

Comme pour la tendance à la hausse du nombre d'affaires, je ne m'attends pas à ce que cette complexité cesse de croître.

Nous nous trouvons dans une situation où la demande met notre capacité à rude épreuve, et les possibilités d'accroître cette capacité sont clairement limitées, notamment par la situation budgétaire et certains aspects de la conception du système.

Par exemple, nous avons eu des difficultés à retenir le personnel, ce qui a contribué dans une certaine mesure aux problèmes actuels. Pour parler franchement, le secteur privé, entre autres, peut offrir aux juristes de l'OMC chargés du règlement des différends des conditions de travail à long terme plus stables et plus lucratives ainsi que de meilleures possibilités d'avancement professionnel. C'est tout simplement la réalité.

Nous avons par conséquent perdu un certain nombre de juristes formés et expérimentés, ainsi que leur mémoire institutionnelle et jurisprudentielle.

Dans les circonstances actuelles, nous avons besoin de juristes chevronnés et expérimentés pour diriger les équipes des groupes spéciaux, surtout si l'on considère que les membres des groupes spéciaux exercent leurs fonctions à temps partiel. Qui plus est, certains d'entre eux n'ont pas d'expérience du système.

Nous devons aussi être conscients que la capacité de l'Organe d'appel est limitée, avant tout par le fait que le Mémorandum d'accord sur le règlement des différends dispose que cet organe sera composé de sept membres.

L'intensité du travail nécessaire pour achever une procédure d'appel dans le délai de 90 jours fait qu'il est impossible pour un membre de l'Organe d'appel de travailler pour deux divisions ayant des programmes de travail similaires ou qui se chevauchent en grande partie.

Il est probable que les appels resteront trop nombreux pour être traités en parallèle par l'Organe d'appel, composé de sept membres. Bien que les recours en appel soient assez espacés dans le temps, l'Organe d'appel ne peut traiter plus de trois procédures, vu leur complexité actuelle, en parallèle.

Par conséquent, même si nous pouvions assurer le secrétariat d'un plus grand nombre de groupes spéciaux que nous ne le faisons actuellement, il y aurait toujours un engorgement insurmontable au niveau de l'Organe d'appel.

Tous ces facteurs expliquent pourquoi certains Membres doivent attendre un certain temps après la composition des groupes spéciaux pour que ceux-ci deviennent opérationnels. Ils expliquent également pourquoi il faudra davantage que 90 jours à l'Organe d'appel pour achever certaines procédures d'appel au cours des prochains mois et pourquoi les parties devront peut-être attendre qu'un créneau se libère pour leur appel.

Je peux vous assurer que nous sommes conscients des retards que certains d'entre vous ont subis récemment, en particulier après la composition des groupes spéciaux.

Je comprends que cela peut entraîner des difficultés pour vous, notamment sur le plan financier.

Je tiens à dire clairement que nous traitons les affaires dans un ordre strictement chronologique, sans discrimination ni favoritisme. Il n'y a rien d'arbitraire ni de subjectif dans la manière dont cet ordre est déterminé.

 

REMÉDIER À LA SITUATION

Voilà donc, en termes très simples, où nous en sommes aujourd'hui.

Lorsque je suis entré en fonctions à cette période l'année dernière, j'ai constaté que les choses étaient encore pires que ce à quoi je m'attendais. La situation était urgente.

Bien que le nombre de différends ait atteint son plus haut niveau depuis une décennie dès 2012, cette diapositive montre qu'en 2013 le Secrétariat n'avait pas assez de juristes auxquels confier de nouveaux différends.

Cela est en partie dû au fait que nous avions perdu un certain nombre de juristes formés et expérimentés au cours des quelques années précédentes.

J'ai donc immédiatement pris des dispositions pour remédier à ces problèmes.

J'ai redistribué les ressources de manière que les trois divisions qui s'occupent du règlement des différends puissent recruter des juristes à des classes de début au titre de contrats temporaires d'un à deux ans, à l'aide de fonds qui étaient disponibles en raison de postes vacants.

Au total, 17 contrats temporaires ont été attribués dans les trois divisions depuis février 2013. Cette redistribution a en partie remédié au besoin de personnes additionnelles de langue maternelle espagnole.

Par ailleurs, nous avons obtenu certains résultats via la mobilité du personnel.

J'envisage d'affecter temporairement deux ou trois membres du personnel de divisions ne s'occupant pas du règlement des différends à des affaires en instance et à venir en tant que juristes principaux.

Ces membres du personnel se sont déjà occupés de différends dans le passé, mais travaillent actuellement dans d'autres divisions. Bien sûr, très peu de membres du personnel ont cette expérience.

Il en va de même du personnel d'appui, qui doit avoir des compétences spécialisées particulières s'apparentant davantage à celles de greffiers, d'auxiliaires juridiques et d'éditeurs professionnels.

Par conséquent, la mobilité (en résumé, le transfert de personnel d'une division à une autre) n'est pas le remède miracle que certains pensent. Nous devons être préparés à prendre des dispositions plus importantes.

En termes simples, le besoin en compétences spécialisées fait que nous aurons besoin de recruter du personnel tant à un niveau élevé qu'aux classes de début.

Bien que nous soyons récemment parvenus à attirer des personnes qualifiées par des contrats temporaires, nous ne pourrons les conserver sans leur offrir une plus grande stabilité et de meilleures perspectives de carrière à long terme. Et lorsqu'elles partent, les efforts et le temps considérables que nous avons investis dans leur formation sont complètement perdus.

Nous devons donc trouver des moyens de conserver les meilleurs une fois que nous les avons recrutés et formés.

Qui plus est, nous devons faire entrer de nouvelles personnes à des classes de niveau élevé, et c'est là qu'existe le principal problème actuellement. Il n'y a tout simplement pas d'offre. Soyons réalistes.

Même si nous faisons entrer de nouvelles personnes à des classes de niveau élevé, il leur faut au moins une année à 18 mois pour acquérir les compétences spécialisées et l'expérience nécessaires pour diriger un groupe spécial ou une équipe d'appel.

Nous allons donc traiter ce problème.

Cette diapositive montre les changements auxquels je vais procéder à cette fin.

J'ai récemment attribué 15 postes additionnels aux 3 divisions qui s'occupent du règlement des différends — 6 à des classes de niveau élevé et 9 aux classes de début. Les avis de vacance concernant ces postes seront publiés la semaine prochaine.

De fait, mon intention est de créer une surcapacité dans le domaine du règlement des différends. Si l'activité en la matière venait à ralentir dans une année ou deux, ce qui là encore est très peu probable, nous mettrons ce personnel à l'œuvre ailleurs dans le Secrétariat — et le ferons revenir si la charge de travail en matière de règlement des différends l'exige.

Bien sûr, recruter du personnel à l'heure actuelle est problématique. Les Membres ont établi des limitations très claires concernant ce que je peux faire, et je ne me lamente pas en disant cela.

Premièrement, il y a le plafond global du budget.

Deuxièmement, il y a le plafond de la proportion du budget qui peut être consacrée au personnel.

Je dois évidemment respecter ces deux plafonds, c'est pourquoi mes options sont limitées.

Je suis en train de réaffecter les ressources dans l'Organisation. Lorsque des postes de rang élevé sont laissés vacants ailleurs dans le Secrétariat, une proportion importante des économies réalisées sera réaffectée au règlement des différends.

Bien sûr, cette approche aura inévitablement des conséquences. Par exemple, nous devrons cesser de faire certaines choses ou nous devrons faire certaines choses avec moins de moyens. Et nous devrons peut-être externaliser une part encore plus grande de notre travail, y compris pour ce qui est de la traduction.

La durabilité de cette approche est évidemment limitée, ce à quoi les Membres souhaiteront réfléchir.

Nous pouvons prendre certaines autres dispositions pour atténuer la pression qui pèse sur le système, outre celles que nous prenons en ce qui concerne le personnel.

Pour commencer, nous devons remédier à la complexité des différends. Il existe des précédents en la matière par exemple:

  • Simplifier la partie descriptive du rapport d'un groupe spécial en annexant au rapport les résumés analytiques des parties. Cela simplifie quelque peu les choses.
  • Fixer des limites de temps pour certains exposés oraux présentés aux groupes spéciaux.
  • Rechercher des moyens de rationnaliser la sélection des experts des groupes spéciaux.
  • En ce qui concerne l'Organe d'appel, normaliser le contenu et la forme des communications et décisions courantes.

Les Membres pourraient envisager de prendre d'autres dispositions dans un esprit similaire par la suite. Je vous demande d'être constructifs!

Les Membres pourraient aussi envisager des mesures plus fondamentales. À vous d'y réfléchir.

Il y a un certain nombre d'années, il a été proposé d'accroître le nombre de membres de l'Organe d'appel.

Dans la situation actuelle, les 7 membres de l'Organe d'appel peuvent gérer environ 10 à 12 appels par an, tout au plus, et ce en portant les capacités à leurs limites et en faisant travailler les membres de l'Organe d'appel quasiment à plein temps. Ce plafond opérationnel est tout simplement trop bas au vu de la demande.

Si, par exemple, les Membres décidaient de porter l'effectif de l'Organe d'appel à neuf personnes, le maximum annuel pourrait être relevé d'environ un tiers.

Cela pourrait remédier dans une certaine mesure à l'engorgement qui existe au niveau de l'Organe d'appel. Mais bien sûr, cela dépend entièrement de vous.

 

CONCLUSION

Nous continuerons de travailler dur pour remédier à ces problèmes.

Mais je pense que les Membres doivent réfléchir à la situation que j'ai décrite aujourd'hui.

Je pense qu'il est important de réfléchir à la manière dont le système a été conçu — et à la manière dont il a évolué depuis.

Nous pensions avoir construit un voilier, mais nous découvrons maintenant que nous avons affaire à un paquebot.

Or un paquebot nécessite évidemment davantage de ressources et de carburant, ainsi qu'un équipage plus nombreux.

Nous devrons donc réfléchir aux ressources que nous sommes disposés à fournir si nous voulons rester à flot.

Je prends des mesures concertées pour relever les défis qui se présentent à nous — mais je dois composer avec des contraintes.

La mobilité et l'invention ne suffiront pas à remédier à notre situation définitivement et de manière adéquate.

Nous devons faire face à la situation telle qu'elle se présente aujourd'hui — et nous devons être honnêtes quant à ce qu'il adviendra si nous ne faisons rien.

Le système de règlement des différends de l'OMC a rendu de grands services aux Membres.

Il est reconnu dans le monde entier pour les résultats équitables et de haute qualité qu'il produit et qui répondent aux besoins des Membres développés comme des Membres en développement.

Il est plus rapide que la plupart, si ce n'est la totalité, des systèmes juridictionnels internationaux en activité aujourd'hui, pour ne rien dire des tribunaux nationaux partout dans le monde.

Nous devons faire en sorte que cela reste le cas. À cette fin, je vous invite à réfléchir sérieusement aux choix et aux décisions difficiles qui nous attendent si nous voulons résoudre les problèmes du système.

Enfin, je saisis cette occasion pour remercier les membres du personnel qui travaillent d'arrache-pied pour prêter assistance aux groupes spéciaux et aux membres de l'Organe d'appel. Le système de règlement des différends de l'OMC n'aurait pas rencontré le succès qu'il connaît actuellement sans leur professionnalisme et leur dévouement.

Je vous remercie.

 

> Presentation

Flux de nouvelles RSS

> Des problèmes pour visualiser cette page?
Veuillez écrire à [email protected] en indiquant le système d’exploitation et le navigateur que vous utilisez.