Questions couvertes par les comités et accords de l'OMC

MODULE DE FORMATION AU SYSTÈME DE RÈGLEMENT DES DIFFÉRENDS: CHAPITRE 3

Les organes de l’OMC intervenant dans le processus de règlement des différends

Dans la procédure de règlement des différends de l’OMC interviennent les parties et les tierces parties à une affaire, l’ORD, des groupes spéciaux, l’Organe d’appel, le Secrétariat de l’OMC, des arbitres, des experts indépendants et plusieurs institutions spécialisées. Le présent chapitre présente les organes de l’OMC intervenant dans le système de règlement des différends. Le rôle joué par les parties et les tierces parties, premiers participants à une procédure de règlement des différends, a déjà été évoqué ici. Les attributions et les responsabilités précises de chacun des intervenants dans le processus de règlement des différends sont exposées plus loin, dans le chapitre sur les étapes du processus de règlement des différends.

Parmi les organes de l’OMC participant au règlement des différends, on peut distinguer une institution politique, l’ORD, et des institutions indépendantes, quasi-judiciaires comme les groupes spéciaux, l’Organe d’appel et les arbitres.

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3.1 L’Organe de règlement des différends (ORD)

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Fonctions et composition

Le Conseil général s’acquitte des fonctions prévues dans le Mémorandum d’accord par l’intermédiaire de l’ORD (article IV:3 de l’Accord sur l’OMC). Comme le Conseil général, l’ORD est composé de représentants de tous les Membres de l’OMC. Il s’agit de représentants des gouvernements, le plus souvent des diplomates en poste à Genève (où siège l’OMC) qui relèvent du ministère du commerce ou de celui des affaires étrangères du Membre de l’OMC qu’ils représentent. En leur qualité de fonctionnaires, ils reçoivent des instructions de leurs capitales sur les positions à adopter et les déclarations à faire à l’ORD. C’est à ce titre que l’ORD est un organe politique.

L’ORD est chargé d’administrer le Mémorandum d’accord, c’est-à-dire de superviser tout le processus de règlement des différends.

LORD a le pouvoir d’établir des groupes spéciaux, d’adopter les rapports de groupes spéciaux et de l’Organe d’appel, d’assurer la surveillance de la mise en ouvre des décisions et recommandations, et d’autoriser la suspension d’obligations qui résultent des accords visés (article 2:1 du Mémorandum d’accord). On expliquera précisément en quoi consistent toutes ces actions plus loin, dans le chapitre sur les étapes de la procédure de règlement des différends. En termes moins techniques, l’ORD est chargé de soumettre un différend à un processus juridictionnel (établissement d’un groupe spécial); de rendre juridiquement contraignante la décision juridictionnelle (adoption des rapports); de manière générale, de surveiller la mise en ouvre de la décision; et d’autoriser des “mesures de rétorsion” lorsqu’un Membre ne se conforme pas à la décision.

L’ORD se réunit aussi souvent qu’il est nécessaire pour respecter les délais prévus par le Mémorandum d’accord (article 2:3 du Mémorandum d’accord). Dans la pratique, l’ORD tient habituellement une réunion ordinaire par mois. Lorsqu’un Membre le demande, le Directeur général convoque des réunions extraordinaires additionnelles. Le personnel du Secrétariat de l’OMC fournit un soutien administratif à l’ORD (article 27:1 du Mémorandum d’accord).

 

Prise de décisions à l’ORD  haut de page

La règle générale veut que l’ORD prenne des décisions par consensus (article 2:4 du Mémorandum d’accord). La note de bas de page 1 relative à l’article 2:4 du Mémorandum d’accord dit qu’il y a consensus si aucun Membre de l’OMC, présent à la réunion de l’ORD au cours de laquelle la décision est prise, ne s’oppose formellement à la décision proposée. Autrement dit, le président ne s’emploie pas à demander à chaque délégation si elle appuie la décision proposée, et il n’y a pas non plus de vote. Par contre, le président demande simplement, par exemple, si la décision peut être adoptée et si personne ne manifeste son opposition, il annonce que la décision a été prise ou adoptée. En d’autres termes, une délégation souhaitant bloquer une décision est tenue d’assister à la réunion et de se montrer vigilante afin de pouvoir le moment venu demander la parole et exprimer son opposition. Tout Membre qui procède ainsi peut, même à lui seul, empêcher l’adoption de la décision.

Toutefois, lorsque l’ORD établit des groupes spéciaux, lorsqu’il adopte les rapports de groupes spéciaux et de l’Organe d’appel et lorsqu’il autorise des mesures de rétorsion, il doit approuver la décision à moins qu’il n’y ait un consensus contre son adoption (articles 6:1, 16:4, 17:14 et 22:6 du Mémorandum d’accord). Cette procédure spéciale de prise de décisions est communément dénommée consensus “négatif” ou “inverse”. Aux trois étapes importantes du processus de règlement des différends susmentionnées (établissement, adoption et rétorsion), l’ORD doit automatiquement décider de procéder à l’action à moins qu’il n’existe un consensus en faveur du contraire. Cela signifie qu’un seul Membre peut toujours empêcher ce consensus inverse, c’est-à-dire éviter que l’adoption de la décision ne soit bloquée. Il suffit pour cela que ce Membre insiste pour que la décision soit approuvée.

Aucun Membre (y compris les parties concernées ou intéressées) n’est exclu du processus de prise de décisions. En d’autres termes, il suffit au Membre demandant l’établissement d’un groupe spécial, l’adoption du rapport ou l’autorisation de suspendre des concessions, pour s’assurer de l’approbation de sa demande, de la faire inscrire à l’ordre du jour de l’ORD. S’agissant de l’adoption des rapports de groupes spéciaux et de l’Organe d’appel, il existe au moins une partie qui, ayant eu gain de cause dans le différend, a tout intérêt à ce que le(s) rapport(s) soi(en)t adopté(s). En d’autres termes, tout Membre ayant l’intention de bloquer la décision d’adopter le(s) rapport(s) doit persuader tous les autres Membres de l’OMC (y compris la partie adverse dans l’affaire en cause) de se rallier à sa cause ou tout du moins de rester passifs. Le consensus négatif relève donc pour une large part de l’hypothèse théorique et à ce jour, il n’y en a jamais eu. C’est pourquoi on parle de la quasi-automaticité des décisions de l’ORD. Cela rompt avec la situation qui prévalait dans le cadre du GATT de 1947, à savoir que les groupes spéciaux pouvaient être établis, leurs rapports adoptés et des mesures de rétorsion autorisées uniquement sur la base d’un consensus positif. Contrairement au GATT de 1947, le Mémorandum d’accord ne ménage donc pas de possibilité à l’un quelconque des Membres de bloquer l’adoption des décisions sur ces importantes questions. Le consensus négatif ne s’applique dans aucun processus décisionnel de l’OMC si ce n’est dans le système de règlement des différends.

Dans les cas où l’ORD administre les dispositions relatives au règlement des différends d’un accord commercial plurilatéral (de l’Annexe 4 de l’Accord sur l’OMC), seuls les Membres qui sont parties à cet accord peuvent prendre part au processus de prise de décisions ou de mesures qu’engagera l’ORD en ce qui concerne les différends au titre de l’accord en question (article 2:1 du Mémorandum d’accord).

Pour ce qui est des aspects plus concrets des travaux de l’ORD, le règlement intérieur des réunions de l’ORD1 dispose que les règlements intérieurs des sessions de la Conférence ministérielle et des réunions du Conseil général2 s’appliquent, sous réserve de quelques règles spéciales relatives au président et sauf dispositions contraires du Mémorandum d’accord. Un aspect organisationnel important de ces règles générales est la nécessité pour les Membres de proposer l’inscription de points à l’ordre du jour d’une réunion à venir au plus tard le jour ouvrable précédant le jour de publication de l’avis annonçant la réunion, soit dix jours civils au moins avant la réunion (règle 3 du règlement intérieur). Concrètement, cela signifie que les points à l’ordre du jour devraient être proposés le 11ème jour précédant la réunion de l’ORD, et le 12ème ou le 13ème jour si le 11ème jour tombe un samedi ou un dimanche.

 

Rôle du président  haut de page

L’ORD a son propre président, qui est généralement l’un des ambassadeurs en poste à Genève, c’est-à-dire le chef de mission de la représentation permanente d’un Membre auprès de l’OMC (article IV:3 de l’Accord sur l’OMC). Le président est désigné par consensus par les Membres de l’OMC. Il a pour l’essentiel des fonctions procédurales, à savoir transmettre des renseignements aux Membres, présider la réunion, annoncer et présenter les points à l’ordre du jour, donner la parole aux délégations souhaitant s’exprimer, proposer la décision demandée, et, si elle est adoptée, l’annoncer. C’est également au président de l’ORD que sont adressées les communications des Membres à l’ORD.

En outre, le président exerce un certain nombre de responsabilités dans des situations particulières. Par exemple, à la demande d’une partie et en consultation avec les parties au différend, il détermine les règles et procédures à suivre dans les différends relevant de plusieurs accords visés dont les “règles et procédures spéciales ou additionnelles” sont contradictoires si les parties ne peuvent s’entendre sur la procédure dans un délai de 20 jours (article 1:2 du Mémorandum d’accord). Le président peut aussi être autorisé par l’ORD à définir des mandats particuliers conformément à l’article 7:3 du Mémorandum d’accord. Il a également le pouvoir de prolonger, après avoir consulté les parties, le délai fixé pour les consultations portant sur une mesure prise par un pays en développement Membre, si les parties ne peuvent pas convenir que les consultations ont abouti (article 12:10 du Mémorandum d’accord). Dans les affaires soumises au règlement des différends concernant un pays moins avancé Membre, celui-ci peut demander au président de l’ORD d’offrir ses bons offices, sa conciliation et sa médiation avant que l’affaire ne soit portée devant un groupe spécial (article 24:2 du Mémorandum d’accord). Enfin, le président de l’ORD doit être consulté avant que le Directeur général ne détermine la composition du groupe spécial conformément à l’article 8:7 du Mémorandum d’accord, et avant que l’Organe d’appel n’adopte ou ne modifie ses procédures de travail (article 17:9 du Mémorandum d’accord).

 

Notes:

1. WT/DSB/9, 16 janvier 1997. retour au texte

2. WT/L/161, 25 juillet 1996. retour au texte

  

  

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Avertissement
Ce module de formation interactif est basé sur le “Guide sur le système de règlement des différends à l'OMC” publié en 2004. La deuxième édition de ce guide, publiée en 2017, est disponible ici.

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